Les contraintes d’un escape game en classe
Première mise en ligne le 29 octobre 2017
Escape game et travail de classe semblent s’opposer. En effet, même si on devrait, dans les deux situations, conduire les participants (élèves ou joueurs) à atteindre ensemble un objectif commun en les laissant se forger par tâtonnement leur propre expérience, les contraintes d’une salle de classe paraissent souvent incompatibles avec les principes d’un vrai escape game. Mais peut-on s’en échapper ?
Effectif de classe / nombre de joueurs
Pour qu’un escape game se déroule correctement, il faut au maximum une dizaine de joueurs [1]. Cela est lié à l’espace de jeu, en règle générale assez réduit, et au nombre d’énigmes accessibles à un temps T. En effet, les joueurs doivent pouvoir être mobiles et se déplacer librement... Ce qui est difficilement compatible avec un effectif de 30 élèves.
C’est pour cette raison que bon nombre d’enseignants réalisent leur escape game avec des classes en demi-groupes, proposant parfois de constituer deux équipes (effectif de 7-9) participant à deux escape games en parallèle.
D’ailleurs, c’est une solution pour un effectif complet : diviser la classe en trois équipes suivies par trois enseignants. Cela suppose cependant une disponibilité et une implication des collègues.
Il est possible aussi de répartir les élèves en petites équipes de 3 ou 4. Mais, malheureusement, cette organisation va généralement de pair avec une réduction de la mobilité des participants. Cela ressemble plus à une activité de classe classique et nuit souvent au travail collaboratif. Pour éviter cela, on peut proposer aux équipes des énigmes légèrement différentes et complémentaires et imposer ainsi une communication et une collaboration entre elles.
L’organisation du jeu ou plutôt sa scénarisation est également très importante. Plus il sera linéaire (la solution de l’énigme A donne accès à l’énigme B, etc) moins vous éclaterez le groupe. Les joueurs suivront tous la même énigme en même temps. Sans parler de l’intérêt moindre du jeu, les joueurs risquent de s’agglutiner autour d’une même énigme. Il est donc nécessaire de scénariser l’escape game en prévoyant, dès le départ, plusieurs pôles d’activité.
Salle de classe / escape room
Le décor est pour beaucoup dans l’atmosphère d’un escape game. La pièce regorge généralement de cachettes, de trappes et autres passages secrets. Dans un établissement scolaire, on a rarement la chance d’avoir à sa disposition un local spécifiquement dédié à cette activité. De même, seuls les enseignants travaillant dans une salle de classe attitrée peuvent se permettre de la décorer et de l’aménager pour le jeu.
De façon générale, les scénarios des jeux d’évasion pédagogiques se déroulent en classe, l’univers quotidien des élèves. C’est la situation initiale qui crée l’ambiance (contamination, disparition, piratage...). Pour le décor, il suffit alors de pousser les tables et de fixer aux murs quelques affiches. Quelques cachettes bien choisies peuvent suffire à déclencher la fouille.
Si on manque de place, le jeu peut être mis en place dans un réfectoire, un gymnase ou un CDI qui se prête d’ailleurs bien aux escape games...
Il faut garder en tête la sécurité des élèves, en évitant par exemple de les faire monter sur les tables pour trouver un indice ou de les laisser ouvrir l’armoire électrique de la salle... Sans en arriver là, il faut bien comprendre qu’on crée une situation particulière et que les comportements peuvent être (principalement lors de la fouille) également particuliers. Et, bien sûr, il est interdit d’enfermer les élèves ! C’est pour cette raison que certains collègues proposent des scénarios où il faut pouvoir entrer et non sortir de la classe.
Exercices / énigmes
Une énigme dans un escape game est... énigmatique. Cela doit rester mystérieux ! Ce n’est pas un quiz, un exercice structuré permettant clairement d’appliquer ce qui a été appris auparavant. Le cheminement pour trouver la solution est libre et peut être tortueux, surtout si la solution dépend d’autres énigmes.
En fait, cela ressemble à certains exercices où il faut analyser divers documents, mais sans question... Aux élèves de trouver la problématique, de se demander ce qu’ils peuvent faire avec, ce qu’on peut bien vouloir attendre d’eux. C’est malgré tout un bon exercice d’entraînement, surtout que c’est aussi un travail de groupe !
Si vous avez des difficultés à vous détacher des activités dirigées, essayez de proposer les consignes sous forme de coup de pouce. Il sera toujours possible de les fournir si les élèves peinent à résoudre les énigmes [2].
Dans certaines disciplines ou pour certaines parties des programmes, détourner des activités classiques en énigmes peut être laborieux. On peut alors proposer un escape game pluridisciplinaire ou le concevoir en fin d’année comme outil de révision de plusieurs parties du programme.
Objectif pédagogique / quête
Le contenu pédagogique et/ou scientifique ne doit pas être dissocié de l’objectif du jeu. Si l’escape game est utilisé comme outil de révision, il est généralement facile de concevoir des énigmes permettant de réinvestir les acquis des élèves.
En phase de découverte, il est plus difficile de s’assurer de l’acquisition de nouvelles aptitudes et connaissances, principalement si la scénarisation n’est pas linéaire. Les joueurs n’auront nécessairement vu qu’une partie des énigmes. Il est alors obligatoire de prévoir un temps de mise en commun permettant d’expliquer le jeu et surtout d’aller plus loin. On peut tout à fait demander aux élèves d’expliquer les énigmes qu’ils ont pu résoudre.
Évaluation / divertissement
Utiliser l’escape game comme outil d’évaluation est envisageable mais délicat à mettre en place. En revanche, on peut observer les attitudes des participants durant le jeu. L’enseignant peut également imposer des rôles aux élèves.
L’évaluation peut également se dérouler lors de la restitution faite par les participants après le jeu, mais cela nécessite un peu de temps afin qu’ils puissent la préparer en amont.
[1] On voit souvent des salles d’escape game prévues pour de 2 à 6 joueurs.
[2] Deux articles sur notre site pour vous accompagner : Créer SON énigme et On a créé une énigme.