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Première mise en ligne le 19 juin 2020
Les escape games pédagogiques peuvent être réels, hybrides ou virtuels. Bien qu’ils tentent de reproduire les conditions d’un jeu réel, les virtuels ont des particularités, notamment celle d’une plus faible présence du professeur, en tant que game master. D’autant plus, si l’activité est réalisée en autonomie : l’élève seul face à l’interface, en connexion asynchrone par rapport au reste de la classe. Dès lors, comment intégrer l’aide à un escape game virtuel, joué en autonomie ?
Dans un escape game réel, l’un des rôles du game master est d’aider les joueurs à atteindre leurs objectifs dans un temps limité. Ce rôle est délicat, car le degré de difficulté de résolution des énigmes participe pleinement au processus d’apprentissage, via l’indispensable débriefing : une énigme qui demande du fil à retordre génèrera sentiments et émotions qui, explicités, permettront de faciliter le processus de mémorisation. Si l’énigme est jugée trop facile ou, au contraire, insolvable sans la communication de sa solution par le game master, le joueur ne prendra pas conscience des processus cognitifs mobilisés. Il s’agit donc, pour le game master, d’agir en médiateur : en favorisant les essais/erreurs, en aidant à la mise en relation d’indices, en identifiant comme tels ceux qui ne l’étaient pas encore pour permettre aux joueurs de changer d’angle d’approche et ainsi faciliter la résolution des énigmes si besoin. Pour ce faire, dans un escape game réel, le game master a plusieurs techniques lui permettant de gérer au mieux le temps et l’aide fournie aux joueurs [1].
Cependant, lorsqu’il s’agit d’un jeu d’évasion numérique joué en autonomie par les élèves, la question de l’aide se pose à nouveau. En effet, l’absence de game master empêche toute interaction humaine qui permettrait une adaptation spontanée aux difficultés rencontrées. Il n’en demeure pas moins que la nécessité d’une médiation puisse se faire sentir. Alors que l’envoi d’un mail et l’attente de sa réponse risquent de casser le rythme du jeu, l’aide intégrée automatique rend le jeu plus fluide. Ces coups de pouce sont cependant identiques pour tous. C’est au joueur d’évaluer l’aide dont il a besoin et d’y recourir si besoin. Les enjeux demeurent, mais les outils varient.
Voici trois techniques permettant d’intégrer de l’aide automatique dans un escape game numérique réalisé avec Genially. Chacune a ses avantages et ses inconvénients. Dans tous les cas, l’aide doit être pensée au moment de la création du jeu pour en permettre la meilleure intégration dans le décor, mais aussi dans le scénario.
Ce Genially réutilisable donne un aperçu, un exemple et un tutoriel pour chacune des trois techniques :
L’aide accordéon
Ce bout de code, intégrable via l’éditeur HTML de l’interaction FENÊTRE dans Genially, permet l’affichage en cascade des indices. Le système d’accordéon, qui se plie et se déplie, assure une vision d’ensemble des énigmes (et peut servir ainsi au joueur de barre de progression) ou une lecture ciblée en fonction des besoins. En effet, la disponibilité de l’ensemble est immédiate, mais le joueur peut décider de dévoiler les indices progressivement, selon son avancée dans le jeu. Il faut néanmoins qu’il n’y ait pas trop d’entrées pour permettre le repérage rapide de l’indice nécessaire à la validation de l’étape. On veillera également à ce que les titres ne dévoilent pas les procédés de résolution, tout en étant suffisamment clairs pour éviter de divulgâcher une énigme au joueur qui l’aurait confondue avec une autre. Ce système a également pour inconvénient de permettre aux joueurs les moins patients ou les plus roublards d’accéder aux solutions de suite. L’énigme difficile devenant alors trop facile, l’apprentissage sera réduit.
La temporalisation
Cette technique utilise les fonctions natives de Genially. Elle consiste à programmer l’affichage automatique des indices de façon progressive dans le temps, en associant chacun d’eux à l’apparition d’un objet interactif animé. Pour être efficace, il est nécessaire que le créateur du jeu ait estimé minutieusement la durée de résolution de chaque énigme, mais aussi des différentes étapes pour y parvenir. En effet, une aide trop tardive pourra décourager les joueurs les moins patients, tandis que l’affichage trop rapide pourra donner l’impression au joueur d’être en retard, ce qui peut être une autre source de découragement. C’est pourquoi la temporalisation se paramétrera d’autant plus facilement que les énigmes sont séparées entre plusieurs diapos : par exemple une succession de salles dans un scénario linéaire, ou un dédale de pièces à visiter sans ordre préétabli dans un scénario convergent. Il faut noter également que les apparitions étant calculées à partir du chargement de la page hôte, le changement de page prolongera le délai d’attente du joueur avant indice. Pour y pallier, on pourra les paramétrer à partir d’un Genially, dans lequel s’intégrerait le Genially de jeu, à l’instar du paramétrage du Minuteur ou encore du POST-EAT de S’CAPE.
Le chatbot
Un chatbot simule l’interaction avec un assistant. Sa création est plus technique et chronophage que l’accordéon et la temporalisation, mais il s’intègre plus facilement dans l’ensemble des structures d’énigmes, qu’elles soient imbriquées ou linéaires. Avec un design personnalisable, il fait partie intégrante de la scénarisation et participe à l’effet de réel en permettant des rétroactions complexes en fonction des choix des joueurs. On s’assurera d’ajouter des entrées qui feront office de leurres pour obliger les joueurs à formuler des demandes précises, et éviter qu’ils ne lisent l’ensemble des échanges en vue d’obtenir les solutions, sans jouer. Selon les services tiers utilisés, le joueur aura à décrire (des mots-clés sont alors reconnus) ou sélectionner parmi des options l’aide dont il a besoin. Certaines plateformes limitent le nombre d’interactions par bot et affichent le bandeau publicitaire de leur marque. Les chatbots peuvent ne pas être compatibles avec l’affichage sur téléphone mobile. Enfin, l’usage d’un service tiers est également à évaluer sous l’angle de la protection des données personnelles, notamment si vous utilisez les variables pour individualiser l’expérience (en demandant au joueur son nom, sa classe...). Soyez donc vigilant quant aux modalités de stockage et de protection des données, en conformité avec le RGPD [2].
Pour conclure
Dans un escape game réel, la meilleure aide qui soit, est celle fournie par les joueurs eux-mêmes, grâce à l’intelligence collective née de la coopération au sein du groupe. Dans un escape game numérique, l’émergence d’une telle collaboration est possible si le jeu s’appuie sur des forums d’aide ou qu’il se joue de façon synchrone, en classe virtuelle [3], par exemple. Mais cette modalité est parfois impossible, notamment pour causes matérielles (faiblesse du débit internet, insuffisance d’équipement informatique…). Faire jouer individuellement les élèves, avec l’intégration de l’aide automatique, permettra de les rendre autonomes dans la découverte et l’expérimentation du jeu. Néanmoins cette relative autonomie ne doit pas faire oublier le débriefing pour lequel l’accompagnement du professeur reste nécessaire.
[3] Voir notre article Loin des yeux, loin du joueur.