Symbioses 139

Article écrit par : Patrice Nadam * Mélanie Fenaert
Première mise en ligne le 26 décembre 2023
Faites vos jeux !

Symbioses est un magazine trimestriel à commander ou à télécharger, sur le thème de l’éducation à l’environnement. Le dossier du mois de décembre 2023 – le numéro 139 Faites vos jeux ! – est consacré à la ludification. Au sommaire : réflexions, pistes pédagogiques et suggestions d’outils et d’associations.

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Le dossier s’ouvre avec de la Matière à réflexion, Jouer pour éduquer : c’est pas d’office gagné écrit par Charlotte Préat. Après avoir exposé les potentiels éducatifs du jeu (motivation et engagement, confiance en soi, meilleures structuration et assimilation des connaissances, capacités transversales), elle présente une sélection de freins et d’idées reçues concernant plus particulièrement le jeune public [1] :

  • tous les enfants ne prennent pas plaisir à jouer ;
  • savoir jouer n’est pas inné chez tous les enfants ;
  • l’intention pédagogique du jeu n’est pas forcément perçue par les enfants ;
  • le concept de digital natives n’existe pas.

Si les apports potentiels du jeu sont nombreux, associer judicieusement ludique et sérieux n’est pas chose aisée.

La partie Méthodologie du dossier est divisée en trois parties.

Dans Animer des jeux en classe : lesquels et comment ?, Michel Van Langendonckt rappelle que réussir sa ludification passe par une bonne gestion de l’avant - pendant - après. Le choix du jeu, de sa mécanique et de sa structure relationnelle est primordial ainsi que la programmation et l’aménagement de l’espace en fonction de ses objectifs. On veillera à conserver une posture d’accompagnement pendant le jeu et on n’oubliera pas de mener un débriefing, voire d’organiser une étape d’analyse du jeu lui-même.

Adapter/créer des jeux ? Pas n’importe comment !, écrit par Vi Tacq, pose les questions essentielles qui aideront à utiliser efficacement le potentiel ludique, lors de la création ou de l’adaptation d’un jeu pour leurs élèves. Pourquoi un jeu ? Quelles promesses ? Quel alignement pédagogique ? Un moyen d’apprentissage magique ? Adapter n’importe quel jeu ? Il est une nouvelle fois rappelé l’importance de définir clairement ses objectifs pédagogiques, de prévoir une phase de test et de ne pas oublier d’intégrer un débriefing.

Gare aux loups présente une adaptation de « Les Loups-garous de Thiercelieux » intégrant la thématique de la déforestation en Amazonie. Il s’agit à l’origine d’un jeu d’ambiance dirigé par un meneur, opposant les « gentils » (les villageois) aux « méchants » (Loups-Garous). Les villageois tentent de démasquer les Loups-Garous, tandis que ces derniers cherchent à éliminer les villageois sans être découverts. L’adaptation aborde la destruction de la forêt amazonienne où les protecteurs de la forêt se confrontent aux destructeurs (les « loups » de l’agrobusiness et leurs lobbyistes). Le jeu suit des étapes narratives définies et permet, lors du débriefing, des discussions pédagogiques sur la déforestation et ses acteurs, offrant ainsi des opportunités d’apprentissage.

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Le magazine fait aussi la part belle aux acteurs Sur le terrain, avec trois articles portant sur des activités ludopédagogiques aussi variées que l’escape game, le jeu vidéo et le jeu de plateau.

L’article Bienvenue à bord du Voyageur du Temps est à la fois un recueil de témoignages d’enseignants et une très bonne synthèse des objectifs et enjeux des escape games pédagogiques : découverte, sensibilisation ou révision, avec mise en action, absence de consignes, énigmes variées, scénario, décor, travail en équipe…
On peut notamment y lire le retour intéressant d’Aurélie Wielme, enseignante, suite à la mise en place du jeu d’évasion Escape Waste dans sa classe par l’association GoodPlanet.

Les élèves se sont pris au jeu, et ils se sont vraiment intéressés à la propreté publique, à la réduction et au tri des déchets, des thèmes qui ne leur parlaient pas nécessairement au départ. Ils ont posé pas mal de questions lors du débriefing. Ce jeu a accru leur implication dans le projet d’école axé sur cette problématique. (...) des élèves habituellement en retrait peuvent se révéler, montrer certaines compétences ou connaissances .

L’article aborde aussi plusieurs pistes pour créer des escape games en lien avec l’environnement, citant des exemples comme Le Voyageur du Temps de WWF-Belgique sur la pollution plastique, ou encore Enigma Botanica, mis en place dans les serres du Jardin botanique de Liège.
Les enseignants interviewés n’omettent pas les potentiels freins : activité un peu déroutante pour les non-initiés, imprévisibilité de la réaction du groupe de joueurs… En bonus, on y retrouve un entretien avec Manuella Guisset, conseillère pédagogique au Louvain Learning Lab de l’UCLouvain et experte en escape games pédagogiques.

Le deuxième article de la partie « Sur le terrain » porte sur le projet pédagogique de Jonathan Ponsard : utiliser Minecraft pour modéliser un éco-quartier en primaire. Un bon moyen pour impliquer les élèves, les sensibiliser à l’environnement, imaginer d’autres possibles mais aussi diminuer l’éco-anxiété.

Le jeu déclenche de la motivation, du plaisir, il permet l’apprentissage par l’action et par l’essai-erreur.

L’usage du jeu vidéo dans un cadre pédagogique bénéficie de l’éclairage critique de Julien Annart, co-auteur du manuel Educajeux.

Enfin, un article décrit le jeu de plateau Mission : Résilience, téléchargeable gratuitement sur le site de l’ADEME. Ce jeu est destiné aux étudiants et aux adultes, et constitue une première approche concrète de la résilience territoriale. Le gameplay demande aux joueurs de débattre, réfléchir, prendre des décisions, tout en préservant l’équilibre avec la dynamique ludique, comme l’explique Anne-Laure Tarbe, formatrice à l’IEC.

Il faut aussi accepter que, par moments, la stratégie prenne le pas sur la réflexion. « Ce coup-ci, pour ne pas perdre, on prend une mesure “mobilité” en tout cas, tant pis si les autres semblent plus intéressantes », lance ainsi un joueur au cours de Mission : Résilience. Mais le jeu est directement suivi d’une phase de débriefing, l’occasion de relancer une question ou un débat ouvert durant la partie, et de fixer certaines notions.

Le magazine se termine par une sélection d’articles et d’adresses utiles, dans laquelle nous avons eu le grand plaisir de nous retrouver. :-)

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[1Charlotte Préat, Docteure en infocom à l’Université catholique de Louvain a soutenu sa thèse sur les pratiques ludiques des enseignants et des enseignantes du primaire en Fédération Wallonie-Bruxelles.