Brassage des génomes

Ah ! Jeunes gens, vous tombez bien ! J’ai besoin d’aide... On raconte au village qu’une maladie est en train d’attaquer tous les plants de tomates des alentours. Martine, une voisine qui connait bien mon exploitation, sait que je cultive mes tomates essentiellement par marcottage et elle m’a affirmé que si mes beaux fruits (formés par autofécondation) n’étaient pas résistants à la maladie, tous les clones allaient être endommagés. TOUS, sans exception ! Qu’est-ce que je vais devenir ? Il faut que je trouve une solution...

Les élèves de Terminale spécialité SVT de Bérénice Vidal-Rosset se lancent dans cette périlleuse mission : soutirer à l’acariâtre Martine les secrets de ses recherches... Mais voilà que celle-ci les laisse se débrouiller et les enferme dans son laboratoire ! Pour pouvoir sortir, il faut retrouver les quatre chiffres du digicode, énigmatiquement dissimulés dans les travaux de la chercheuse et dispersées dans la pièce !

Parmi les documents, microscopes, variétés de tomates et autre bric-à-brac vintage, les joueurs révisent des notions de Première liées à la méiose : ordre des phases et vocabulaire (hétérozygote/homozygote) ainsi que des notions du chapitre précédent (la fleur). Ils découvrent aussi et surtout les notions de Terminale : les crossing-overs (égal et inégal) et les brassages intra et interchromosomiques.

Ces notions sont abordées au travers de cinq énigmes, dont la validation repose sur des activités LearningApps (ordonnancement, quiz, association, texte à trous) et un codage lettre-chiffre. Cette dernière énigme est à la fois simple (trouver les lettres correspondant à deux génotypes hétérozygotes) et pas si évidente, bien que la roue de décodage soit située au même endroit : la consigne n’explicite en effet pas la relation entre les lettres recherchées et la roue... Une énigme bien conçue, qui pimente le jeu parmi les autres énigmes au côté assez scolaire.

Au sein du jeu virtuel, le réel surgit avec une énigme validée par la professeure. Pour obtenir le troisième chiffre de la combinaison, ils doivent en effet appeler Bérénice, qui leur « glisse un papier sous la porte » : il s’agit d’un schéma du brassage intrachromosomique et d’un schéma du brassage interchromosomique à compléter. S’ils le font correctement, ils obtiennent un document à passer sous l’eau pour faire apparaître le chiffre 4. Une envie de réel pour Bérénice, qui avait jusqu’ici créé et testé des jeux uniquement virtuels.

J’ai mis en place cet escape game car j’ai senti que les élèves n’étaient pas très motivés par l’arrivée du chapitre de génétique... J’ai donc pensé que ludifier les notions pouvait constituer une nouvelle approche qu’ils apprécieraient davantage. J’ai aussi déjà créé deux escape games sur Genially en collège pendant le confinement (Découvertes en immunologie et Drôle de casting pour l’éducation à la sexualité) mais je n’avais pas eu l’occasion de voir les élèves jouer en direct et je voulais voir ce que ça donnait en présentiel.

Les qualités de Brassage des génomes sont nombreuses : des décors réalistes et cohérents avec le scénario (issus de la banque d’images gratuites Pixabay), des énigmes en parallèle qui convergent vers le cadenas final, des astuces techniques reposant sur les animations (apparition d’une clé parmi les tomates, glissement dans une serrure, ouverture d’un tiroir...). Un jeu attractif visuellement, au contenu scientifique dense, pour lequel la première session de jeu a permis de relever quelques points à améliorer.

Les élèves se sont rapidement lancés dans le jeu mais ont perdu beaucoup de temps sur certains exercices (images de méiose à remettre dans l’ordre et le texte à trou sur les brassages génétiques notamment). Ils ont trouvé ça difficile et ont été vite agacés de ne pas tout trouver rapidement. Certains se sont aussi débrouillés pour trouver le code sans résoudre les énigmes ce qui est dommage. Je pense bloquer l’accès au code avant d’avoir vu toutes les énigmes pour résoudre ce problème. Agrandir les équipes pourrait aussi permettre aux élèves d’avancer plus vite : ils ont mis à deux bien plus de temps que ce que j’avais prévu.

Les astuces pour rendre un cadenas numérique inviolable sont nombreuses, et on ne peut en effet que conseiller de remédier rapidement à ce souci : dans un jeu en temps limité, la tentation de prendre un chemin de traverse est trop grande pour nos élèves [1], surtout quand la réflexion demandée par les énigmes est importante ! Notre article Créer codes et mots de passe avec Genially fournit plusieurs méthodes, par exemple avec l’extension Gicode qui ferait parfaitement l’affaire ici.

Pour réduire les difficultés rencontrées par les élèves, pourquoi ne pas leur proposer avant la séance de réviser les notions de Première, sans leur révéler la suite ? De plus, faire travailler les élèves en équipe plus conséquente (5 ou 6) avec plusieurs écrans à disposition leur permettra de se répartir les énigmes, de discuter, de s’expliquer leurs découvertes, et d’être plus efficaces sur la phase de jeu. Le débriefing qui s’ensuivra n’en sera que plus nécessaire afin que tous aient accès à l’ensemble des connaissances issues du jeu, et qu’ils puissent construire une trace collective de leur expérience.

Le moment de réflexion sur le jeu est inclus dans le jeu : ils doivent mettre à l’écrit ce qu’ils ont compris pour l’expliquer au vieux paysan. De manière collective, je ferai le débriefing à la prochaine séance en leur demandant de réaliser une carte mentale avec les mots clés, car en génétique, c’est surtout la complexité des nombreux mots de vocabulaires qui peut poser problème.

Bravo et merci Bérénice pour le partage de cette expérience !